La compression
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- Gaiwawan
- Bushi
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La compression
On sait tous que, historiquement, la compression a permis de faciliter le transport et le stockage. Elle permet aussi «d'affiner» une post fermentation avec les thés et les conditions adéquats. Mais a t elle d'autres apports ? Je constate que l'on trouve de plus en plus des galettes de thé blanc ou de oolong. Pourquoi ?
- Elise
- Bourgeon Miraculeux
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Re: La compression
Merci pour cette question intéressante. Je vais essayer d'y répondre sous la forme d'une réflexion personnelle que ton post a soulevé et qui m'a poussé à faire quelques recherches là-dessus. Cette réponse est une synthèse de ce que l'on peut trouver facilement sur le net en français et en anglais, de quelques ouvrages de référence, et de mon expérience personnelle en matière de thé compressé. Si d'autres membres ont d'autres informations, qu'ils n'hésitent pas à compléter ma réponse ou à alimenter la discussion
Comme tu le soulignes, il est bon de se souvenir que la compression est au départ une question pratique. Le maocha était compressé afin de prendre moins de place, d'être moins abimé et donc plus facilement transportable en termes de volume et de fragilité. De plus, certains thés étaient vraisemblablement pulvérisés avant d'être pressés dans des moules à relief.
Sous les Tang on utilisait des mini-briquettes rondes et percées qui, disposées sur une cordelette comme un collier, servaient de monnaie.
Déjà dans des époques assez anciennes, les thés compressés pouvaient aussi bien comprendre ce qu'on appelle puerh aujourd'hui que des thés rouges ou encore des hei cha tels que les liu bao. Jusqu'à la fin du 14e siècle, la grande majorité de la production était compressée et il n'y a que dans les zones rurales qu'on jetait des feuilles de thé en vrac directement dans l'eau chaude. C'est pour des économies de main d'oeuvre que le processus est réduit au plus simple par un décret datant de l'an 1391. La fabrication du thé passe de "thé séché, conditionné en galette (puis brisé, cuit, broyé et infusé/fouetté)" à "thé vert en feuilles infusé". Dès lors les thés compressés restent destinés aux populations nomades ou retirées aux confins de la Chine.
La suite de l'histoire révèle par exemple qu'au 19e siècle les Russes font fabriquer des briques au Fujian avec les résidus de thé de basse qualité pour leurs armées et pour le peuple russe. Cet exemple illustre le fait que le thé compressé et le thé en vrac ont coexisté à toutes les époques et que les raisons de le compresser ont presque toujours été des raisons pratiques à l'origine. De même le vieillissement s'est fait par la force des choses, souvent à cause de moyens de transports longs ou de stockage de thé servant de monnaie d'échange. Le bon vieillissement du thé n'a semble t'il pas été pressenti comme un résultat de la compression, cela ne semble pas avoir été vraiment anticipé.
Cependant l'histoire relativement récente du thé compressé - en particulier du puerh - et des questions de hausse du prix lié au vieillissement ont semble-t-il soulevé les questions suivantes :
"qu'est-ce qui peut supporter la compression en galettes?"
"qu'est-ce qui peut vieillir et bénéficier d'une compression?"
"qu'est-ce qui peut se vendre?"
À partir de là, on peut imaginer qu'à peu près tout type de thé - thé vert primeur mis à part - peut rentrer dans la course. Ainsi on voit fleurir sur le marché des galettes de bourgeons, de fleurs de camélia, de puerh mêlé de fleurs de rose et ainsi de suite...
----
Pour des infos historiques:
Rougeventre K., L'empire du thé. Le guide des thés en Chine, Ed De Maule, Paris, 2017.
Comme tu le soulignes, il est bon de se souvenir que la compression est au départ une question pratique. Le maocha était compressé afin de prendre moins de place, d'être moins abimé et donc plus facilement transportable en termes de volume et de fragilité. De plus, certains thés étaient vraisemblablement pulvérisés avant d'être pressés dans des moules à relief.
Sous les Tang on utilisait des mini-briquettes rondes et percées qui, disposées sur une cordelette comme un collier, servaient de monnaie.
Déjà dans des époques assez anciennes, les thés compressés pouvaient aussi bien comprendre ce qu'on appelle puerh aujourd'hui que des thés rouges ou encore des hei cha tels que les liu bao. Jusqu'à la fin du 14e siècle, la grande majorité de la production était compressée et il n'y a que dans les zones rurales qu'on jetait des feuilles de thé en vrac directement dans l'eau chaude. C'est pour des économies de main d'oeuvre que le processus est réduit au plus simple par un décret datant de l'an 1391. La fabrication du thé passe de "thé séché, conditionné en galette (puis brisé, cuit, broyé et infusé/fouetté)" à "thé vert en feuilles infusé". Dès lors les thés compressés restent destinés aux populations nomades ou retirées aux confins de la Chine.
La suite de l'histoire révèle par exemple qu'au 19e siècle les Russes font fabriquer des briques au Fujian avec les résidus de thé de basse qualité pour leurs armées et pour le peuple russe. Cet exemple illustre le fait que le thé compressé et le thé en vrac ont coexisté à toutes les époques et que les raisons de le compresser ont presque toujours été des raisons pratiques à l'origine. De même le vieillissement s'est fait par la force des choses, souvent à cause de moyens de transports longs ou de stockage de thé servant de monnaie d'échange. Le bon vieillissement du thé n'a semble t'il pas été pressenti comme un résultat de la compression, cela ne semble pas avoir été vraiment anticipé.
Cependant l'histoire relativement récente du thé compressé - en particulier du puerh - et des questions de hausse du prix lié au vieillissement ont semble-t-il soulevé les questions suivantes :
"qu'est-ce qui peut supporter la compression en galettes?"
"qu'est-ce qui peut vieillir et bénéficier d'une compression?"
"qu'est-ce qui peut se vendre?"
À partir de là, on peut imaginer qu'à peu près tout type de thé - thé vert primeur mis à part - peut rentrer dans la course. Ainsi on voit fleurir sur le marché des galettes de bourgeons, de fleurs de camélia, de puerh mêlé de fleurs de rose et ainsi de suite...
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Pour des infos historiques:
Rougeventre K., L'empire du thé. Le guide des thés en Chine, Ed De Maule, Paris, 2017.
- Kissaki
- Bourgeon Miraculeux
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- David
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Re: La compression
Gaiwawan a écrit : Elle permet aussi «d'affiner» une post fermentation avec les thés et les conditions adéquats.
Tu as des sources pour ça ?
- Tsubo
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Re: La compression
Elise a écrit :"qu'est-ce qui peut se vendre?"
À partir de là, on peut imaginer qu'à peu près tout type de thé - thé vert primeur mis à part - peut rentrer dans la course. Ainsi on voit fleurir sur le marché des galettes de bourgeons, de fleurs de camélia, de puerh mêlé de fleurs de rose et ainsi de suite...
Ne pas oublier la "tradition" du cadeau de "révérence" / cadeau d'affaire : une galette / une brique est un objet tangible bien plus marquant qu'un sachet
- Elise
- Bourgeon Miraculeux
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- Localisation : Genève, Suisse
Re: La compression
Exact, une galette c’est un objet physique, qui se garde comme un bien précieux. Et le papier qui l’emballe peut être imprimé à l’effigie d’un événement spécial, d’une commémoration.
Cela dit on peut aussi offrir du thé non compressé, mais dans ce cas il sera dans de belles boîtes en métal, souvent au nombre de trois, et dans un coffret doublé d’un calage et d’un riche tissu à l’intérieur.
Je pense que la galette représente, d’une façon plus ou moins consciente, une tradition ancienne et est donc revêtue d’une certaine préciosité.
Cela dit on peut aussi offrir du thé non compressé, mais dans ce cas il sera dans de belles boîtes en métal, souvent au nombre de trois, et dans un coffret doublé d’un calage et d’un riche tissu à l’intérieur.
Je pense que la galette représente, d’une façon plus ou moins consciente, une tradition ancienne et est donc revêtue d’une certaine préciosité.
- Gaiwawan
- Bushi
- Message(s) : 1723
- Inscription : 15 Jan. 2017
Re: La compression
Merci Elise
Aucune mais ça me semble être logique. La compression joue sur les vides et donc sur la circulation d'air, l'hydrométrie à l’intérieur de la galette etc. Je ne pense pas que, à thé et stockage équivalent, une galette peu compressée donne la même liqueur qu'une galette très compressée.
Mais je me trompe peut être
David a écrit :Gaiwawan a écrit : Elle permet aussi «d'affiner» une post fermentation avec les thés et les conditions adéquats.
Tu as des sources pour ça ?
Aucune mais ça me semble être logique. La compression joue sur les vides et donc sur la circulation d'air, l'hydrométrie à l’intérieur de la galette etc. Je ne pense pas que, à thé et stockage équivalent, une galette peu compressée donne la même liqueur qu'une galette très compressée.
Mais je me trompe peut être
- Nic
- Apprenti
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Re: La compression
Gaiwawan a écrit :Merci EliseDavid a écrit :Gaiwawan a écrit : Elle permet aussi «d'affiner» une post fermentation avec les thés et les conditions adéquats.
Tu as des sources pour ça ?
Aucune mais ça me semble être logique. La compression joue sur les vides et donc sur la circulation d'air, l'hydrométrie à l’intérieur de la galette etc. Je ne pense pas que, à thé et stockage équivalent, une galette peu compressée donne la même liqueur qu'une galette très compressée.
Mais je me trompe peut être
Le test n'est pas impossible à faire. Comme une galette est plus compressée au milieu que sur les bords, on peut essayer de voir si il y'a une différence sur le thé après quelques années de stockage.
- Geoffroy86
- Disciple
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Re: La compression
Déjà la compression a un effet non négligeable.
Pour avoir goûté un thé en version maocha et galette, la différence était assez nette. La compression avait eu tendance à arrondir le thé, ce qui pour moi était un peu dommage. D'après ce que l'on m'a dit, cela rendait le thé plus accessible car plus facile d'approche. Tout dépend des goûts de chacun donc.
La conservation est encore un autre sujet, complémentaire à celui de la compression bien entendu.
Pour avoir goûté un thé en version maocha et galette, la différence était assez nette. La compression avait eu tendance à arrondir le thé, ce qui pour moi était un peu dommage. D'après ce que l'on m'a dit, cela rendait le thé plus accessible car plus facile d'approche. Tout dépend des goûts de chacun donc.
La conservation est encore un autre sujet, complémentaire à celui de la compression bien entendu.
- Blossom
- Récolte de Printemps
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- Inscription : 21 Oct. 2013
Re: La compression
Nic a écrit :Gaiwawan a écrit :Merci EliseDavid a écrit :Gaiwawan a écrit : Elle permet aussi «d'affiner» une post fermentation avec les thés et les conditions adéquats.
Tu as des sources pour ça ?
Aucune mais ça me semble être logique. La compression joue sur les vides et donc sur la circulation d'air, l'hydrométrie à l’intérieur de la galette etc. Je ne pense pas que, à thé et stockage équivalent, une galette peu compressée donne la même liqueur qu'une galette très compressée.
Mais je me trompe peut être
Le test n'est pas impossible à faire. Comme une galette est plus compressée au milieu que sur les bords, on peut essayer de voir si il y'a une différence sur le thé après quelques années de stockage.
Si on veut comparer un maocha et sa version pressée, il faut aussi garder à l'esprit que la compression ce n'est pas simplement un pressage. Le thé est passé à la vapeur, il gagne en humidité. Les galettes sont ensuite entreposées sur des claies pour un séchage final. Comme le thé est sous forme de galettes (ou briques, tuo,...), le séchage est plus long, et non homogène. Durant le séchage, et selon l'aboutissement du sha qing, l'oxydation peut reprendre légèrement. Un thé pressé peut donc être bien différent de son maocha, mais pas seulement à cause de la moindre circulation d'air durant le vieillissement.
In case of doubt, boil it out
- Hogosha
- Apprenti
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- Inscription : 16 May. 2019
- Localisation : Berne
Re: La compression
C'est très intéressant.
On le voit les raisons sont nombreuses et surtout ont beaucoup changé au fil des âges. Le distinctif principal actuellement serait selon moi:
- Commercial, la compression de quasi toutes les familles de thé semble être un trend depuis quelques années
- Gustatif, encore et toujours plus de personnes curieuses et de connaisseurs, sans oublier les collectionneurs ou ayant à l'esprit une plus-value certaine
Maintenant quand on voit que des blends de galettes/nids/pavés sont habilement mis en composition avec des belles, ou du moins grandes feuilles sur le dessus et qu'au milieu en brisant, on voit plus de tiges ou de morceaux disgracieux, on ne peut s'empêcher de penser que déjà autrefois une certaine forme de "contrefaçon" était utilisée et que la compression est idéale pour dissimuler des thés peu homogènes.
Ne m'y connaissant pas assez en pu'erh de bonne qualité, je me trompe peut-être et qu'il est convenu depuis longtemps que cette pratique existe et n'est pas significative pour le goût tant que le blend est stable de par sa numérotation de référence...
On le voit les raisons sont nombreuses et surtout ont beaucoup changé au fil des âges. Le distinctif principal actuellement serait selon moi:
- Commercial, la compression de quasi toutes les familles de thé semble être un trend depuis quelques années
- Gustatif, encore et toujours plus de personnes curieuses et de connaisseurs, sans oublier les collectionneurs ou ayant à l'esprit une plus-value certaine
Maintenant quand on voit que des blends de galettes/nids/pavés sont habilement mis en composition avec des belles, ou du moins grandes feuilles sur le dessus et qu'au milieu en brisant, on voit plus de tiges ou de morceaux disgracieux, on ne peut s'empêcher de penser que déjà autrefois une certaine forme de "contrefaçon" était utilisée et que la compression est idéale pour dissimuler des thés peu homogènes.
Ne m'y connaissant pas assez en pu'erh de bonne qualité, je me trompe peut-être et qu'il est convenu depuis longtemps que cette pratique existe et n'est pas significative pour le goût tant que le blend est stable de par sa numérotation de référence...
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